Voyage sur la ligne des hirondelles
Parmi ma première sélection de lignes de train retenues pour les voyages confectionnés pour cet hiver, le choix de cette petite ligne pourtant assez méconnue, même parfois par les locaux, m'est apparu comme une évidence. Pour son nom poétique d'une part, qui selon la légende vient du fait que les habitants de la ville de Morez, regardaient depuis leurs fenêtres les ouvriers travailler sur la ligne des Viaducs Morbier / Morez et avaient l’impression que les ouvriers tutoyaient les hirondelles.
Pour la prouesse des travaux effectués sur cette ligne pendant plus de 50 ans aussi.
Et bien évidemment pour la beauté des paysages qu'elle traverse.
La ligne débute à Dole (qu'on a rejoint en 2h de TGV de Paris) et mène ensuite en 2h30 de Dole à Saint-Claude, via Morez (qui sera notre terminus pour rejoindre ensuite la station des Rousses) et Arc-et- Senans. Longue de 107 km, elle fait traverser 36 tunnels et surtout 18 viaducs construits dans les reliefs du massif jurassien.
2h30 de voyage durant lequel on voit défiler les paysages de la forêt de Chaux, des vignobles d'Arbois, des vastes plateaux du Grandvaux, de la vallée de la Bienne, sans oublier les vues offertes sur la région avant et après le passage du tunnel du col de la Savine (948 m d’altitude), point culminant du trajet.
Nous mesurons notre chance car la beauté du spectacle est décuplée par le soleil, et par la quantité de neige, qui apparait comme par magie en milieu de parcours, faisant disparaitre les vertes plaines par de somptueux décors hivernaux.
Toute la ligne est belle et traverse des paysages variés mais c'est incontestablement le tronçon Morbier-Morez qui est le plus impressionnant et justifie à lui seul le voyage. Les viaducs s'y succèdent à chaque boucle en épingle et on ne sait plus où donner de la tête, à tel point qu'on a réellement failli manquer notre arrêt...
Un voyage sur cette ligne ferroviaire, remarquable par ses ouvrages, son tracé et les sites qu’on y découvre donne vraiment l’envie d’aller voir plus loin à partir
de ses gares.
Nous jetterons notre dévolu sur Morez, gare la plus proche (8km) de la célèbre station des Rousses.
Arrivée à la station des Rousses
Sans conteste l’un des plus beaux spots du Jura, c'est aussi une station très prisée grâce à ses quatre villages : Les
Rousses, Lamoura, Prémanon et Bois d’Amont. Labellisée 4 sapins, elle est accessible à tous et c’est ce qui ravit les familles. L’esprit de la montagne
y est au rendez-vous et le choix des activités est vaste.
Même si ce n'est malheureusement pas au programme cette année, sachez que Les Rousses comptabilise pas moins de 50km de pistes de ski
alpin avec 32 remontées mécaniques qui vous permettront de vous balader partout sur le domaine. De là, vous aurez un panorama exceptionnel sur la chaîne des Alpes, le Mont Blanc
et la vallée du Léman.
Mais le domaine est surtout reconnu comme étant l’un des plus beaux et des plus grands domaines français de ski de fond
!
Véritable paradis blanc au cœur du Parc naturel du Haut-Jura, le domaine de ski de fond de la Station des Rousses a été récompensé par la plus haute distinction du label Nordic France (5 Nordics, excellence en ski de fond, activités, services et environnement).
Les amateurs de ski de fond s'adonneront à leur sport avec des possibilités infinies puisque les pistes de la Station sont reliées aux domaines voisins des Hautes-Combes, de Bellefontaine ou encore de la Suisse Romande...
Equilibre, respiration à pleins poumons, contemplation, calme et bien-être...
Nous séjournons pour notre part au village des Rousses, village calme et typique de
Franche-Comté avec ses chalets et maisons en bois, ses boutiques et restaurants. Lamoura et Prémanon ont une ambiance peut-être encore plus magique mais Les Rousses offre l'avantage
d'avoir tout à portée de main, ce qui est bien pratique quand on n'est pas motorisé...
Nous nous installons dans notre petit studio, parfaitement équipé, pratique et cosy à
souhait pour notre court séjour, à 10 minutes à pied du centre du village des Rousses.
Le Lac des Rousses
Une fois installée, nous voilà partie pour une belle randonnée autour du Lac des Rousses.
En hiver, lorsque la température chute et laisse place au froid sec, les lacs des Montagnes du Jura gèlent. Pour le plus grand plaisir de tous, ils
deviennent accessibles aux promeneurs et patineurs sur glace (en faisant vraiment attention car la pratique de l'activité n'est généralement pas encadrée). Un vrai air de
Canada...
Le lac des Rousses, situé au cœur de la station, est le plus sûr car on y trouve un espace balisé et sécurisé avec pisteur
secouriste et la possibilité de louer les patins directement sur place. Mais ce n'était pas le cas au moment de notre passage, nous n'avons pas su si c'était à cause du contexte lié
au covid, ou parce que la couche de glace n'était pas suffisamment épaisse.
Quoi qu'il arrive, la balade pour s'y rendre est super agréable. On traverse alors sans le savoir le Golf des Rousses, à cette saison grand terrain
de jeu enneigé pour les randonneurs.
Les abords du lac, avec vue sur le lac totalement recouvert de neige sont superbes aussi.
Seules les nombreuses barques en partie ensevelies sous la neige nous permettent d’imaginer qu’en été le lac des Rousses a des allures de mer intérieure avec ses plages et ses activités nautiques.
Après 2 heures de grand air (pendant lesquelles nous sommes surprises de ne pas sentir le froid, avoisinant pourtant les -6°), nous revenons au village en quête d'un repas pour le soir. La mission n'est pas si simple car nous sommes dimanche après-midi et les restos proposant la vente à emporter sont fermés, tout comme les supermarchés...
Une fromagerie et une sorte d'épicerie vendant produits du terroir (fromage, charcuterie, vin..) restent tout de même ouvertes.
Ravies de notre trouvaille, on hésite entre raclette et fondue...jusqu'à ce qu'on réalise qu'une raclette sans pomme de terre ou une fondue sans
pain, ce n'est pas idéal... Mais pas le choix, il faut bien se nourrir, le réveil à 6h du matin commence à se faire sentir. On optera donc pour la raclette sans pomme de terre, accompagnée d'un
excellent vin du Jura et franchement, c'était pas mal du tout...
Les Rousses sous la neige
Après une bonne nuit bien méritée, nous découvrons au réveil un village encore bien plus enneigé que la veille... Il a probablement neigé toute la nuit et les habitants des Rousses s'adonnent à leur activité favorite, le déneigement, avec leur pelle ou des engins plus sophistiqués ressemblant à des tondeuses à gazon...pour neige.
La neige étant au programme toute la journée, nous nous dirigeons vers l'Office de tourisme pour prendre des renseignements sur les activités envisageables. On optera pour une randonnée en raquette, dans la forêt pour bénéficier d'une visibilité correcte.
Après l'achat de notre forfait (5€ la journée !!), la location de nos raquettes (7€ la journée), un passage par le supermarché pour notre déjeuner et notre dîner (on ne se fera pas avoir une 2ème fois), nous voilà de retour pour déjeuner dans notre studio.
Equipées pour affronter le grand froid (-7° cette fois) nous voilà parties vers la forêt du Risoux, pour suivre l'itinéraire de la Roche blanche (une piste rouge, attention...;-))
La randonnée démarre derrière le chalet Odesia au Crépillon (à 5 minutes de notre studio et au pied d'un arrêt Skibus lorsqu'il fonctionne, ce qui n'est pas le cas en période de Covid). Le début du chemin en pente raide à travers bois nous fait très vite oublié les températures basses. Je regrette même d'avoir mis une polaire sous mon blouson...
On évolue au cœur de la forêt du Risoux jusqu’au carrefour de la Loge à Ponard, un ancien chalet d'alpage dans lequel il est possible (plutôt au retour pour se récompenser des efforts fournies), de faire une pause gourmande à la chaleur du feu de bois. Bien plus qu'un restaurant, ce lieu déborde d'énergie et offre de nombreuses prestations en totale communion avec la nature environnante. Des luges et des pelles à neige sont même mises gratuitement à disposition pour les enfants.
De là, on a déjà pris un peu de hauteur et la vue est très belle. Les épais flocons qui tombent sans relâche rajoute à la magie et au calme du paysage.
On poursuit ensuite notre chemin en s'enfonçant dans la forêt. On s'habitue au rythme et aux efforts que cela demande (cela reste tout à fait surmontable) pour se
laisser habiter par le décor unique à l'ambiance ouatée et par le silence que seul le crissement de nos raquettes dans la poudreuse vient troubler.
La sensation de nos pas foulant cette neige si épaisse et légère nous procure une vraie sensation de bien être et de liberté. Je savoure chaque
instant, en me disant que ce sera peut être la dernière fois cette année que je verrai la neige...
On alterne entre sentiers sinueux dans la forêt, clairières entourées de grands arbres, c'est juste sublime.
La dernière partie, à nouveau un peu plus pentue, nous conduit au belvédère de la Roche Blanche, où un magnifique point de vue sur la
station et la vallée vous attend.
On profite un moment du superbe tableau mais ne tardons pas trop à entamer le chemin du retour, car il ne reste qu'1h30 avant la tombée de la nuit, et n'ayant pas croisé âme qui vive de toute la randonnée, il ne nous parait pas très opportun de prendre le risque...
Nous rentrons au studio à 17h30, plus qu'heureuse de notre journée, et avec la perspective d'une bonne fondue franc-comtoise (composée uniquement de comté de différents âges) en guise de récompense pour le dîner.
Retour sous le soleil
Déjà le jour du départ...Le soleil est de retour et c'est un bonheur de voir cette neige fraiche scintiller.
Je vais faire court sur les détails logistiques mais notre train du retour ayant été annulé, notre trajet retour se fera par un autre itinéraire, tellement beau également que les désagréments que cela a engendré seront vite oubliés.
Nous partons donc en voiture jusqu'à la gare de Bellegarde, à environ 1h15 des Rousses. C'est la gare qui suit celle de Genève sur la ligne du TGV Lyria Genève-Paris.
La route pour s'y rendre est superbe, longeant la frontière franco suisse sur une grande partie du trajet. Nous passons par le Col de la faucille, qui nous offrira un spectacle de toute beauté avec en première plan une poudreuse immaculée, et en arrière plan, le Lac Léman, dominé par le Mont Blanc qui surgit d'une mer de nuage. Un tableau que l'on pourrait observer pendant des heures...
Puis on perd de l'altitude, les températures remontent, la neige se fait moins épaisse. On traverse différents petites villes et villages, dont Gex, très jolie ville qui incite à la découverte.
Nous voilà arrivées à la gare, toute neuve et assez futuriste de Bellegarde. On ne se resoud pas à quitter ces paysages enneigés donc malgré la température fraiche, on s'improvise un dernier pique nique dehors, au soleil... et dans la neige.
Embarquement. La suite du voyage nous réserve encore bien des surprises : le lac de Nantua (à Montréal la Cluse), puis la
Cluse, mirage turquoise surgissant dans un virage...
Je poursuis le voyage, plongée dans mes rêves, et dans un livre très inspirant...sur les voyages en train...